Dans le préambule de la note programme à l’intention de la maîtrise d’œuvre, vous indiquez : « l’objectif est de valoriser l’image de Belfort en renforçant l’attractivité de son patrimoine urbain et architectural par l’embellissement des espaces publics du centre-ville ». Tout est dit dans cette phrase de l’ambition et des limites du projet. Deux mots balises : IMAGE et CENTRE.
Nous voterons contre ce rapport car nous ne partageons pas cette vision des critères d’attractivité de notre ville. Certes le centre peut bénéficier de certains efforts, d’un renforcement de sa végétalisation, d’un éclairage public plus économe en énergie. Mais tous les quartiers de Belfort ont ce type de besoin. Or ils ne font pas l’objet d’autant d’attentions et nous, nous voulons que leurs besoins soient pris en compte pour que cesse le sentiment d’inégalité de traitement entre les quartiers. Si on se limitait pour le faubourg de France, à un programme ciblant les vrais besoins, il serait possible d’investir plus massivement à d’autres endroits : les crédits dégagés pourraient être consacrés pour partie au moins aux travaux d’aménagement prévus dans le cadre de l’opération de renouvellement urbain du quartier Jean Jaurès, en particulier pour commencer dans l’îlot dit du Vélodrome. Cinq îlots avaient été identifiés lors de l’étude préliminaire et la convention passée avec les différents partenaires de la ville prévoyait des travaux dès cette année, qu’en est-il ?
L’avenir des commerces du centre-ville belfortain dont il est question ici n’est, il est vrai, pas assuré. Et c’est pour nous aussi une préoccupation. Mais il n’y aura pas d’avenir si on ne met pas en œuvre une politique cohérente au niveau de l’agglomération, voire à l’échelle de l’aire urbaine, pour éviter les concurrences stériles et mortifères. La pandémie est en train par ailleurs de bouleverser l’ensemble du secteur de l’habillement, qui est une composante essentielle du commerce de centre-ville. De grandes enseignes sont extrêmement fragilisées. Certaines vont disparaître. Des enseignes belfortaines seront-elles concernées ? Que vont devenir, notamment, les Nouvelles Galeries ? C’était, avec le parking enterré de la maison des Arts et l’aménagement des rives de la Savoureuse un des trois grands projets de votre précédent mandat. Vous avez, lors de la cession de l’immobilier des Nouvelles Galeries à un groupe spécialisé, déclaré que cela ne remettait pas en cause vos projets, or depuis plus rien. Pouvez-vous garantir aux salariés du magasin et aux Belfortaines et Belfortains que cette locomotive du FG de France va faire l’objet, de la part de l’entreprise, des investissements indispensables pour garantir sa survie ? Que la ville a toujours un projet concernant les alentours du magasin ?
Mais je reviens au projet d’aménagement que vous nous présentez pour faire trois observations.
La première est de souligner que depuis la fin des années 70 et le dossier ville moyenne, de multiples interventions urbaines ont transformé Belfort et son centre-ville. L’aménagement du Fbg de France a déjà fait l’objet depuis d’une refonte profonde, qui devrait pouvoir être maintenue quelques années encore. La dernière tranche a été faite en 2010 or on estime généralement qu’une requalification a une durée de vie d’au moins 70 ans ! On ne peut pas changer d’aménagement au gré des humeurs et des modes comme on change de chemise. C’est beaucoup trop coûteux.
La deuxième observation est de souligner que les intentions, enjeux, orientations sont tellement nombreuses et diverses, que si la maîtrise d’œuvre voulait les prendre toutes en compte, ce n’est pas 4 millions d’euros de dépenses qu’il faudrait prévoir, mais plus du double. Est-il normal de déposséder le conseil municipal de sa responsabilité de choisir les priorités en lui proposant d’approuver un choix aussi ouvert ? Est-il pertinent de lancer un cabinet sur des études alors que le projet part dans tous les sens et qu’aucune réelle orientation n’est donnée, puisqu’il s’agit en plus de maintenir, au maximum, l’existant ? Quelle marge de manœuvre y a-t-il réellement ?
La troisième observation est un appel au réalisme : nous ne sommes pas dupes du discours sur « le lieu de partage, d’échanges, une destination plaisir » évoqué page 2 du rapport comme le premier objectif. Un exemple sur la question de la végétalisation. Les contraintes de desserte camions de livraison ajoutées aux contraintes des réseaux vont, nous en sommes certains, ramener cette belle promesse de « canopée de qualité » à une réalité qui ne sera pas fondamentalement en rupture avec la situation actuelle.
Finalement, à partir d’un diagnostic erroné sur la situation du centre-ville, qu’illustrent de façon presque caricaturale les derniers mots de la première phrase de votre rapport – « les usagers sont à distance des surfaces commerciales », ces mots m’ont plongée dans une très grande perplexité – mais qu’est que cela veut dire ? -, il est impossible de prescrire un bon traitement. Celui que vous nous proposez n’est qu’un placebo.