5 octobre 2024

Retrouver la maîtrise de mon engagement

J’ai pris la décision, après y avoir longtemps réfléchi, de démissionner du conseil municipal
– et donc de quitter également le conseil communautaire ainsi que l’ensemble de mes
délégations.

Je veux tout de suite préciser que cette démission n’est pas un renoncement au combat
politique. Je vais continuer à le mener dans le cadre de notre collectif. Nous avons toujours
dit que nous voulions faire de la politique autrement. Ma démission est la traduction, en un
acte clair et concret, de cette volonté.

Pas un renoncement ni un arrêt donc, mais une bifurcation. Pour moi l’engagement
politique doit être utile à la société. Je fais le constat que mon mandat de conseillère
municipale et communautaire est devenu une impasse. C’était un investissement très lourd
en temps, en énergie. Il m’a apporté beaucoup d’informations sur les dossiers locaux,
beaucoup de contacts précieux et intéressants et je ne regrette pas les efforts faits. Ils
m’ont armée pour le futur. Mais en presque quatre ans de mandat, mon constat est clair : il
est impossible, sauf parfois sur des détails, de peser sur les décisions prises. Je choisis donc
un autre chemin pour mener le combat.

Cette démission se veut bien sûr d’abord et avant tout la dénonciation de système que D.
Meslot a mis en place. Il conduit le conseil municipal et le conseil d’agglomération à être
purement et simplement des chambres d’enregistrement des décisions prises qu’il prend
seul ou presque.

J’ai le sentiment, en continuant à siéger, que j’accepte de me laisser enfermer dans un
cadre qui me contraint à la critique. Et s’il y a beaucoup à dire sur les échecs de D Meslot, je
ne veux pas être condamnée au clash et à la polémique qui semblent les seuls moyens pour

exister. Ce n’est pas comme cela que je conçois le mandat. Je me suis battu pendant trois
ans contre ce déni quotidien et continu de démocratie.

Je veux me battre contre ce déni quotidien et continu de démocratie. La décision que nous
avons prise d’attaquer le fonctionnement de D. Meslot devant le tribunal administratif
(suivie par d’autres démarches du même ordre) nous permettra de vérifier le bien fondé de
notre analyse. Et si le tribunal comme je le crois nous donne raison, ce sera une victoire
importante non pas pour nous mais pour la démocratie locale : nous aurons fait notre
travail d’élu d’opposition.

En attendant la décision du tribunal, je choisis donc aujourd’hui un autre chemin pour
mener le combat. Je veux me donner le temps de la rencontre, du dialogue, de la
découverte. Je veux me revivifier dans ce contact avec la population et « la vraie vie » et me
nourrir de ces prochains échanges pour élaborer nos propositions pour le prochain mandat.
Je veux donc me libérer du temps pour m’engager autrement pour ce qui m’anime depuis
toujours : la volonté de construire un avenir de justice sociale, de respect du vivant et de
notre environnement, avec toutes et tous.

Je veux agir concrètement, obtenir des résultats en reprenant la maîtrise de mon
engagement, et je fais le constat que je ne peux pas y arriver en restant dans ce mandat. Je
choisis donc une autre voie ; car ce n’est pas là, au sein du conseil municipal, que se joue
l’avenir de la ville.

Mais bien sûr je ne pourrais pas m’arrêter là sans quelques considérations personnelles.
Vous savez que c’est l’un de mes chevaux de bataille, et ça le reste plus que jamais : être
une femme en politique, qui plus est une femme relativement jeune, divorcée et avec
enfants, ce n’est pas facile. Et chaque semaine un fait ou une réflexion me le rappelle –

réflexions qui viennent aussi d’ici, de notre propre camp, et qui montrent à quel point le
patriarcat nous a contaminés. Je sais déjà que l’on dira que je suis fragile, pas capable de
résister. Que si je démissionne maintenant, c’est que je n’ai pas la stature. Tout cela ne
m’intéresse pas et ne me fait pas peur et par ailleurs, contrairement à d’autres, je ne me
crois propriétaire d’un droit particulier du seul fait d’avoir été élue et de m’être accrochée à
mon mandat comme une moule à son rocher. J’ai appris, j’ai montré que je pouvais
connaître les dossiers et apparaître comme une interlocutrice valable au long de ces
années. Ce qui compte, c’est ce que nous pouvons construire ensemble, car nous avons
besoin de tout le monde pour cet autre monde possible que nous imaginons. Et cela je peux
continuer à le faire en dehors de ces instances vidées de leur sens que sont ces conseils.

Je fais donc le pari de pouvoir faire avancer les choses autrement. Je reprends la main sans
être soumise à l’agenda d’un autre. Je laisse ma place. Je remercie René Schmidt, Annie
Baulay et Florian de leur amitié et de leur soutien constant .Et comme j’ai confiance dans le
collectif, je sais que l’arrivée de Karel Trapp comme nouvel élu pourra aussi donner un
nouvel élan à notre groupe, à nos idées, et lui permettre d’aller plus loin. Permettre à Karel
de se frotter à cette réalité, de se former comme nous l’avons fait, c’est aussi renforcer
notre collectif en vue de l’échéance de 2026.

Mathilde Regnaud